"Espace dédié et consacré à la jeunesse catholique du diocèse de Porto-Novo!..."
"SAINTE THERESE DE L'ENFANT JESUS, PRIEZ POUR NOUS!..." " FERVENTE ANNEE LITURGIQUE & FRUCTUEUX TEMPS DE L'AVENT "
ANNEE DE LA FOI ! "Dieu nous aime. N’ayons pas peur de l’aimer. La foi se professe par la bouche et par le cœur, par la parole et par l’amour" Pape François "
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lundi 2 décembre 2013

RECOLLECTION DE L’AVENT AUX JEUNES (AVENT 2013)


THEME  DIEU FRAPPE A NOTRE PORTE AVEC UN VISAGE D’ENFANT : PREPARONS NOUS A L’ACCUEILLIR

 
Lorsqu’une année liturgique finit, une autre s’ouvre aussitôt par le temps de l’Avent. Le temps de l’Avent lui-même introduit un autre temps, celui de Noël. Le temps de l’Avent est un temps préparatoire à l’accueil de Dieu qui vient à nous dans le Petit Enfant de Bethléem.
Pour nous préparer à un si grand événement de foi et de joie, nous voudrions vous proposer d’aller à l’école du pape François. Aux JMJ dernières, dans son homélie lors de la célébration eucharistique du mercredi 24 juillet 2013 en la Basilique du Sanctuaire national Notre Dame d’Aparecida, le Pape François recommandait aux jeunes trois attitudes qui les aideront à être « artisans d’une nation et d’un monde plus justes, plus solidaires et plus fraternels ». Il s’agit de trois attitudes fort simples : « garder l’espérance, se laisser surprendre par Dieu, et vivre dans la joie ».
A voir de près, ces mêmes attitudes pourront nous aider à nous préparer, à travers ce temps de l’Avent, à la grande joie de la Nativité.
 

1-       GARDER L’ESPERANCE
Le messie dont nous célébrons la venue à Noel a été longtemps désiré et attendu par le peuple d’Israël. Son annonce intervient souvent dans un contexte où l’espoir est compromis par le mal et la souffrance. Le peuple à bout de force attend « la force qui sauve ». Le messie attendu porte donc en lui l’espoir d’un monde meilleur ou règne la justice, la paix et la joie. Les prophéties messianiques le soulignent largement.

Voici mon serviteur que je soutiens, mon élu, celui qu’il m’a plu de choisir. J’ai mis mon esprit sur lui : il établira la justice parmi les nations. Il ne crie pas, il n’élève pas la voix, on n’entend pas ses proclamations sur les places. Il ne brise pas le roseau qui plie, il n’éteint pas la mèche qui faiblit ; en toute vérité il fait avancer la justice. Il ne faiblira pas, on ne le brisera pas, qu’il n’ait établi sa justice sur la terre : les îles attendent sa loi. Is 42,1-4

Réjouis-toi, fille de Sion, lance des cris joyeux, fille de Jérusalem, car voici que ton roi vient à toi. Il t’apporte justice et victoire, il est humble, monté sur un âne, sur un ânon, petit d’une ânesse. Il détruira les chars d’Éphraïm et les chevaux de Jérusalem ; on pourra alors briser l’arc de guerre, car il imposera sa paix aux nations. Son empire s’étendra de la mer à la mer, depuis l’Euphrate jusqu’aux confins du monde. Za 9,9-10

Un rejeton sortira de la souche de Jessé, une pousse se lèvera de ses racines. Sur lui reposera l’Esprit de Yahvé, esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et de crainte de Yahvé. Il ne jugera pas sur les apparences, il ne décidera pas sur un bruit qui court. Il jugera les petits avec justice, il défendra les droits des pauvres du pays. Sa parole, comme une trique, frappera le violent, son verdict, comme une bourrasque, emportera le méchant. La justice sera son ceinturon, toujours là sur ses reins avec la vérité. Le loup habitera avec l’agneau, le léopard se couchera à côté du chevreau, le veau et le lion s’en iront au même pâturage sous la conduite d’un petit garçon. La vache et l’ourse seront amies, leurs petits dormiront ensemble, et le lion mangera de la paille comme le bœuf. Le bébé jouera sur le nid du serpent, l’enfant à peine sevré mettra la main dans le trou de la vipère. On ne fera plus de mal, on ne détruira plus sur toute ma montagne sainte, car la connaissance de Yahvé couvrira la terre comme les eaux le domaine des mers. Isaïe 11, 1-9

Le peuple qui marchait dans la nuit, a vu une grande lumière. Comme ils restaient en terre de ténèbres, une lumière a brillé sur eux. Tu as multiplié la nation, tu as fait déborder sa joie. Ils sont en fête devant toi comme au jour de la moisson, c’est la joie comme au partage du butin. Car le joug qui pesait sur eux, le bâton qui frappait ses épaules, le fouet de son surveillant, tu les as brisés comme au jour de Madian. Les chaussures de guerre et le manteau souillé de sang sont brûlés, jetés en pâture aux flammes. Oui, un enfant nous est né, un fils nous a été donné. L’insigne du pouvoir est placé sur son épaule. On lui donne ce nom : « Conseiller-merveilleux, Dieu-fort, Père-éternel, Prince-de-la-paix. » Avec lui l’empire grandit, et c’est la paix sans fin pour le trône de David et pour sa dynastie : il l’établit et l’affermit dans le droit et la justice. Le zèle de Yahvé Sabaot fera que cela soit, dès maintenant et à jamais. Isaïe 9, 1-6

 
En nous préparant à Noël, réveillons notre espérance d’un monde meilleur. Oui les difficultés existent et existeront, nous ne le nions pas. Mais croyons-le, le Messie vient visiter son peuple et le sauver (CfLc2, 11). Plus de peur, de détresse, d’abattement, de découragement. C’est pourquoi le Pape peut déclarer :

Ne perdez jamais l’espérance ! Ne l’éteignez jamais dans vos cœurs ! Le « dragon », le mal, est présent dans notre histoire, mais il n’est pas le plus fort. Dieu est le plus fort ! Dieu est notre espérance ! C’est vrai que de nos jours, tous, un peu, et nos jeunes aussi, se sentent séduits par beaucoup d’idoles qui substituent Dieu et semblent donner espérance : l’argent, le succès, le pouvoir, le plaisir. Une sensation de solitude et de vide gagne souvent le cœur de beaucoup et les pousse à la recherche de compensation, de ces idoles éphémères. Chers frères et sœurs, soyons des lumières d’espérance ! Ayons un regard positif sur la réalité. » (Pape François, Journées Mondiales de la Jeunesse, Discours officiels et messages, Salvator, p 19).

 
2-       SE LAISSER SURPRENDRE PAR DIEU

L’image qu’évoque le thème de notre recollection est déjà bien éloquente. C’est déjà une belle surprise que Dieu décide de venir jusqu’à nous. Mais allons plus loin.

Imaginons la scène. Dieu s’annonce. Il vous donne rendez-vous. Tout excité de recevoir Dieu, vous l’attendez avec enthousiasme… Et puis il est là ; il frappe à votre porte ! Votre sang fait un tour fulgurant. La joie et la crainte révérencielle se livrent combat en vous. Vous tentez alors de bien vous tenir et surtout de vous contenir. Il faut ouvrir la porte et… Surprise ! Vous trouvez à votre porte une corbeille dans laquelle un petit enfant vous sourit… Dieu est là avec un visage d’enfant.

Notre Dieu surprend toujours ! En bien ! « L’homme ou la femme d’espérance – la grande espérance que la foi nous donne – sait que, même au milieu des difficultés, Dieu agit et nous surprend ». (Pape François, op cit, p 20)

En ce temps de l’Avent, ouvrons nos cœurs et nos vies à toutes les surprises que Dieu veut nous faire. Car il nous veut toujours du bien. Toute l’histoire du salut en est parsemée. Dans l’Ancien Testament, Dieu ouvre toujours un chemin devant ses élus et devant son peuple pour les sortir des difficultés, des impasses. Et Jésus aussi dans le Nouveau Testament. Il en donne le ton aux noces de Cana tout au début de son ministère. La joie de la fête allait être compromise. Les mariés allaient essuyer la honte de ne pouvoir mener la fête à sa fin. Mais Jésus relance la fête, il relance la joie avec la surprise d’un vin meilleur à celui qui fut utilisé jusque là. Ce qui permet au Pape de faire remarquer :

Dieu surprend toujours, comme le vin nouveau dans l’Évangile (…). Dieu réserve toujours ce qu’il y a de meilleur pour nous. Mais il nous demande de nous laisser surprendre par son amour et d’accueillir ses surprises. Ayons confiance en Dieu ! Si nous nous éloignons de lui, le vin de la joie, le vin de l’espérance finit. Si nous nous approchons de lui, si nous restons avec lui, nos froideurs, nos difficultés, nos péchés se transforment en vin nouveau d’amitié avec lui. (Pape François, op cit, p 20)

 

3-       VIVRE DANS LA JOIE

« Chers amis, si nous marchons dans l’espérance, nous laissant surprendre par le vin nouveau que Jésus nous offre, il y aura de la joie en nos cœurs et nous ne pourrons être que des témoins de cette joie. Le chrétien est joyeux, il n’est jamais triste. » (Pape François, op cit, p 21)

L’attente d’un messie, d’un Rédempteur qui déjà est à nos côtés et nous fait des surprises agréables, ne peut alors être que joyeuse. On ne peut attendre un événement heureux en étant tristes. Le mystère de l’Incarnation est un mystère joyeux en toutes ses parties.

Nous voyons dans les Evangiles comment chaque événement qui marque les débuts de la vie de Jésus est caractérisé par la joie. Lorsque l’ange Gabriel vient annoncer à la Vierge Marie qu’elle deviendra la mère du Sauveur, il commence par ces mots : « Réjouis-toi ! » (Lc 1, 28). Lors de la naissance du Christ, l’ange du Seigneur dit aux bergers : « Voici que je vous annonce une grande joie qui sera celle de tout le peuple : aujourd’hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur. » (Lc 2, 11) Et les mages qui cherchaient le nouveau-né, « quand ils virent l'étoile, ils éprouvèrent une très grande joie ». (Mt 2, 10) Le motif de cette joie est donc la proximité de Dieu, qui s’est fait l’un de nous. C’est d’ailleurs ainsi que l’entendait saint Paul quand il écrivait aux chrétiens de Philippes: « Soyez toujours dans la joie du Seigneur ! Laissez-moi vous le redire : soyez dans la joie ! Que votre sérénité soit connue de tous les hommes. Le Seigneur est proche. »(Ph 4, 4-5) La première cause de notre joie est la proximité du Seigneur, qui m’accueille et qui m’aime. (Pape Benoît XVI, Message pour la XXVIIème Journée mondiale de la jeunesse, 2012)
 

Chers amis jeunes, nous avons donc l’obligation de vivre en joie ; j’allais dire que nous avons un « devoir de joie ». C’est le moment de sortir de nos peurs, de nos craintes, de nos angoisses de santé, d’études, d’apprentissage, d’emploi, de piété, d’affection, de conception, de vie conjugales, etc. pour nous laisser à la joie du messie qui vient illuminer nos vies de sa lumière.

Jésus nous a montré que le visage de Dieu est celui d’un Père qui nous aime. Le péché et la mort ont été vaincus. Le chrétien ne peut pas être pessimiste ! Il n’a pas le visage d’une personne qui semble être en deuil permanent. Si nous sommes vraiment amoureux du Christ et si nous sentons combien il nous aime, notre cœur s’« enflammera » d’une joie telle qu’elle contaminera tous nos voisins. (Pape François, op cit, p 21)

 
Le chrétien ne doit pas être pessimiste. Le jeune ne doit pas être pessimiste car à côtés de difficultés – oui il y en a – il y a aussi toutes ces joies que le Seigneur nous offre et auxquelles nous devons faire attention :

Chaque jour, nombreuses sont les joies simples que le Seigneur nous offre : la joie de vivre, la joie face à la beauté de la nature, la joie du travail bien fait, la joie du service, la joie de l’amour sincère et pur. Et si nous y sommes attentifs, il y a de nombreux autres motifs de nous réjouir : les bons moments de la vie en famille, l’amitié partagée, la découverte de ses capacités personnelles et ses propres réussites, les compliments reçus des autres, la capacité de s’exprimer et de se sentir compris, le sentiment d’être utile à d’autres. Il y a aussi l’acquisition de nouvelles connaissances que nous faisons par les études, la découverte de nouvelles dimensions par des voyages et des rencontres, la capacité de faire des projets pour l’avenir. Mais également lire une œuvre de littérature, admirer un chef d’œuvre artistique, écouter ou jouer de la musique, regarder un film, tout cela peut produire en nous de réelles joies. (Pape Benoît XVI, Message pour la XXVIIème Journée mondiale de la jeunesse, 2012)

 

4-       NOTRE ENGAGEMENT POUR L’AVENT : SEMEURS DE JOIE

Forts de notre espérance, ouverts aux surprises de Dieu, nous avons le cœur en joie. Pour que notre joie soit grande et totale, il faut la partager. Plus on la donne, plus elle grandit. Pour ce temps de l’Avent nous avons à être des missionnaires de la joie. Dans le monde d’aujourd’hui de plus en plus difficile, tant de jeunes autour de vous ont un immense besoin d’entendre que le message chrétien est un message de joie et d’espérance !

Chers amis, (…) je voudrais vous exhorter à être missionnaires de la joie. On ne peut pas être heureux si les autres ne le sont pas : la joie doit donc être partagée. Allez dire aux autres jeunes votre joie d’avoir trouvé ce trésor qui est Jésus lui-même. Nous ne pouvons pas garder pour nous la joie de la foi : pour qu’elle puisse demeurer en nous, nous devons la transmettre. Saint Jean l’affirme : « Ce que nous avons vu et entendu nous vous l'annonçons, afin que vous aussi soyez en communion avec nous [...] Tout ceci nous vous l'écrivons pour que notre joie soit complète » (1 Jn 1, 3-4).

Parfois, une image du Christianisme est donnée comme une proposition de vie qui opprimerait notre liberté et irait à l’encontre de notre désir de bonheur et de joie. Mais ceci n’est pas la vérité ! Les chrétiens sont des hommes et des femmes vraiment heureux parce qu’ils savent qu’ils ne sont jamais seuls et qu’ils sont toujours soutenus par les mains de Dieu ! Il vous appartient, surtout à vous, jeunes disciples du Christ, de montrer au monde que la foi apporte un bonheur et une joie vraie, pleine et durable. Et si, parfois, la façon de vivre des chrétiens semble fatiguée et ennuyeuse, témoignez, vous les premiers, du visage joyeux et heureux de la foi. L’Evangile est la “bonne nouvelle” que Dieu nous aime et que chacun de nous est important pour lui. Montrez au monde qu’il en est ainsi !

Soyez donc des missionnaires enthousiastes de la nouvelle évangélisation ! Allez porter à ceux qui souffrent, à ceux qui cherchent, la joie que Jésus veut donner. Portez-la dans vos familles, vos écoles et vos universités, vos lieux de travail et vos groupes d’amis, là où vous vivez. Vous verrez qu’elle est contagieuse. Et vous recevrez le centuple : pour vous-même la joie du salut, la joie de voir la Miséricorde de Dieu à l’œuvre dans les cœurs. Et, au jour de votre rencontre définitive avec le Seigneur, il pourra vous dire : « Serviteur bon et fidèle, entre dans la joie de ton maître ! » (Mt 25, 21)

samedi 6 avril 2013

LA POSITION DE LA DOCTRINE CATHOLIQUE SUR LES MARIAGES MIXTES ET INTERRELIGIEUX

 
Entretien avec le Secrétaire du Conseil pontifical pour la famille, Mgr Jean Laffitte
 
 
Le cas des mariages mixtes
 
«Le terme «mariage mixte» ne s’applique qu’aux mariages entre chrétiens de différentes confessions – catholiques avec orthodoxes ou protestants – , c’est-à-dire entre baptisés. Le mariage entre personnes de religions différentes est appelé «mariage avec disparité de culte». Pour les mariages mixtes, il faut une dispense de la part de l’autorité ecclésiastique. Il s’agit de mariages très populaires dans de nombreux pays, même en Europe. En Allemagne, par exemple, les familles composées de catholiques et de luthériens représentent la moitié de la population. Ces unions ne montrent pas de difficultés particulières, car les mariés ont tous deux pour référence le Christ. Toutefois, ce n’est pas si simple d’aimer quelqu’un qui ne partage pas la même appartenance religieuse ; vues les éventuelles implications possibles, le chrétien qui veut participer activement à la vie de foi, doit donc se demander si son conjoint n’entrave pas sa pratique religieuse. La foi catholique relie le mariage à un mystère qui est plus grand, à savoir celui de l'union entre le Christ époux et l’Église épouse. Pour les catholiques, le mariage est le septième sacrement et il ne représente donc pas seulement un signe de la volonté de l’union entre les deux mariés, mais le signe efficace de l’union du Christ avec l’Église et du baptisé avec le Christ.
Pour l’Église catholique, le mariage n’est pas seulement l’union entre un homme et une femme, mais un mystère ecclésial. Lorsque l’on se marie avec une personne de confession différente, il faut se poser les questions suivantes à l’avance– pour la pratique du culte, quelles seront les manières familiales de vivre la foi chrétienne à travers, par exemple, la prière commune, ou la confession dans laquelle les enfants seront baptisés et éduqués – ce qui représente un sujet de vie conjugale très important, qui ne peut certes pas être relégué dans l’indécision et renvoyé à la vie familiale après les noces. Pour obtenir l’autorisation de se marier de la part de l’autorité ecclésiastique, il faut un engagement des mariés à baptiser leurs enfants et à les éduquer dans la foi catholique. Il y a, ensuite, le problème de la notion du mariage comme sacrement, ce qui est valable seulement pour les catholiques et non pas pour les protestants qui ne croient pas à l’indissolubilité du mariage, justement parce qu’ils ne croient pas au mariage comme à un mystère d’union des époux avec le Christ, admettant par conséquent le divorce et le remariage. Pour les catholiques, au contraire, le Christ conclut dans le mariage, une alliance avec les mariés qui est, de par sa nature, irrévocable, et qui dure par conséquent jusqu’à la mort de l’un des époux. Il s’agit là de questions fort importantes qui nécessitent une pastorale consacrée».
 
Quelle est, au contraire, la condition des mariés avec disparité de culte?
 
«Nous parlons ici de mariages entre un conjoint chrétien et l’autre qui ne l’est pas. Il est impossible d’analyser ici, en détail, les problèmes spécifiques relatifs aux unions, par exemple, avec un hindou, un bouddhiste ou un shintoïste. Il s’agit, toutefois, de nombreux problèmes qui sont souvent insurmontables, qui font l’objet d’enquêtes et sont inclus dans les études et les recherches de la part des Conférences épiscopales des pays où le phénomène est surtout relevé, ou encore de la part des institutions académiques (l’Institut pontifical Jean-Paul II pour les études sur le mariage et la famille). En Europe, en Afrique, au Moyen-Orient et dans certains pays d’Asie comme l’Indonésie, la Malaisie et l’Inde, les mariages les plus répandus sont, au contraire, ceux entre croyants des religions monothéistes, en particulier entre catholiques et musulmans.
Afin que le mariage soit valable, il faut une dispense explicite de renonciation. Pour bénéficier de cette autorisation, il doit y avoir un accord entre les parties sur les fins et les propriétés essentielles du mariage. La partie catholique s’engage avec l’autre partie à maintenir et à vivre sa propre foi, à baptiser les enfants et à les éduquer dans l’Église catholique. Il est ainsi facile de percevoir, dès le début, la difficulté spécifique des unions islamo-chrétiennes.
La tradition islamique exige que les enfants musulmans soient élevés dans la religion du père musulman. Dans certains pays où la loi islamique est en vigueur, le mariage entre chrétiens et musulmans est même interdit. Dans d’autres, comme par exemple au Liban où la cohabitation des deux religions existe depuis longtemps, on relève des expériences positives de mariages entre musulmans et chrétiens. Cependant, la plupart des problèmes surviennent au fil du temps, après des années de vie conjugale, tels que les conflits sur l’éducation des enfants, la conception de la femme, ou tout simplement la différente ferveur religieuse des deux conjoints envers leur propre foi. J’ai connu des familles ayant une disparité de culte apparemment sereine, dans lesquelles la partie pratiquante était surtout celle musulmane. De la part des catholiques, il peut alors y avoir le risque d’un indifférentisme religieux dominant, qui amène le conjoint chrétien à se contenter de respecter le conjoint musulman, en renonçant à témoigner de façon visible sa propre foi en Jésus-Christ».
 
Mgr Jean LAFFITTE

lundi 18 février 2013

RECOLLECTION DE CARÊME AUX JEUNES (CARÊME 2013)

THEME  CROIRE DANS LA CHARITE SUSCITE LA CHARITE. NOUS AVONS RECONNU ET NOUS AVONS CRU QUE L'AMOUR DE DIEU EST PARMI NOUS

Pour notre recollection de Carême nous vous livrons tout simplement le riche message du Pape sur le rapport entre la Foi et la Charité. En cette année de la foi, nous ne trouvons pas meilleure proposition de thème puisque le Carême se veut souvent le temps de tous les efforts spirituels et charitables… A partir de ce message chacun pourra discerner quelles orientations il pourra donner à « son » Carême. Nous, nous faisons juste quelques propositions.


MESSAGE DE BENOIT XVI POUR LE CAREME 2013

CROIRE DANS LA CHARITE SUSCITE LA CHARITE. NOUS AVONS RECONNU ET NOUS AVONS CRU QUE L'AMOUR DE DIEU EST PARMI NOUS

 1.       La foi comme réponse à l'amour de Dieu.

Dans ma première encyclique, j’ai déjà offert certains éléments pour saisir le lien étroit entre ces deux vertus théologales, la foi et la charité. En partant de l'affirmation fondamentale de l'apôtre Jean: Nous avons reconnu et nous avons cru que l'amour de Dieu est parmi nous, je rappelais qu'à l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive... Comme Dieu nous a aimés le premier, l’amour n’est plus seulement un commandement, mais il est la réponse au don de l'amour par lequel Dieu vient à notre rencontre. La foi constitue l'adhésion personnelle, qui inclut toutes nos facultés, à la révélation de l'amour gratuit et passionné que Dieu a pour nous et qui se manifeste pleinement en Jésus-Christ. La rencontre avec Dieu Amour interpelle non seulement le cœur, mais également l'esprit. La reconnaissance du Dieu vivant est une route vers l’amour, et le oui de notre volonté à la sienne unit intelligence, volonté et sentiment dans l’acte totalisant de l’amour. Ce processus demeure cependant constamment en mouvement, car l’amour n’est jamais achevé ni complet. De là découle pour tous les chrétiens, et en particulier, pour les personnes engagées dans les services de charité, la nécessité de la foi, de la rencontre avec Dieu dans le Christ, qui suscite en eux l’amour et qui ouvre leur esprit à l’autre, en sorte que leur amour du prochain ne soit plus imposé pour ainsi dire de l’extérieur, mais qu’il soit une conséquence découlant de leur foi qui devient agissante dans l’amour. Le chrétien est une personne conquise par l'amour du Christ et donc, mû par cet amour, il est ouvert de façon concrète et profonde à l'amour pour le prochain. Cette attitude naît avant tout de la conscience d'être aimés, pardonnés, et même servis par le Seigneur, qui se penche pour laver les pieds des apôtres et s'offre lui-même sur la croix pour attirer l'humanité dans l'amour de Dieu. La foi nous montre le Dieu qui a donné son Fils pour nous et suscite ainsi en nous la certitude victorieuse qu’est bien vraie l’affirmation: Dieu est Amour. La foi, qui prend conscience de l’amour de Dieu qui s’est révélé dans le cœur transpercé de Jésus sur la croix, suscite à son tour l’amour. Il est la lumière, l’unique lumière, qui illumine sans cesse un monde plongé dans l’obscurité, et qui nous donne le courage de vivre et d’agir. Tout cela permet de comprendre que l'attitude principale qui distingue les chrétiens est précisément l’amour fondé sur la foi et modelé par elle.

2.       La charité comme vie dans la foi.

Toute la vie chrétienne est une réponse à l’amour de Dieu. La première réponse est précisément la foi comme accueil, plein d’émerveillement et de gratitude, d’une initiative divine inouïe qui nous précède et nous interpelle. Et le oui de la foi marque le début d’une histoire lumineuse d’amitié avec le Seigneur, qui remplit et donne son sens plénier à toute notre existence. Mais Dieu ne se contente pas que nous accueillions son amour gratuit. Il ne se limite pas à nous aimer, mais il veut nous attirer à lui, nous transformer de manière profonde au point que nous puissions dire avec Paul: Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi. Quand nous laissons place à l’amour de Dieu, nous devenons semblables à lui, nous participons de sa charité même. Nous ouvrir à son amour signifie le laisser vivre en nous, et nous conduire à aimer avec lui, en lui et comme lui. C’est alors que notre foi devient vraiment opérante par la charité et qu’il prend demeure en nous. La foi, c’est connaître la vérité et y adhérer. La charité, c’est cheminer dans la vérité. Avec la foi, on entre dans l’amitié avec le Seigneur. Avec la charité, on vit et on cultive cette amitié. La foi nous fait accueillir le commandement du Seigneur et Maître, tandis que la charité nous donne la béatitude de le mettre en pratique. Dans la foi, nous sommes engendrés comme fils de Dieu, et la charité nous fait persévérer concrètement dans la filiation divine en apportant le fruit de l’Esprit Saint. La foi nous fait reconnaître les dons que le Dieu bon et généreux nous confie, et la charité les fait fructifier.

3.       Le lien indissoluble entre foi et charité.

A la lumière de ce qui a été dit, il apparaît clairement que nous ne pouvons jamais séparer, voire opposer, foi et charité. Ces deux vertus théologales sont intimement liées et il est erroné de voir entre celles-ci une opposition ou une dialectique. D’un côté, l’attitude de celui qui place d’une manière aussi forte l’accent sur la priorité et le caractère décisif de la foi, au point d’en sous-évaluer et de presque mépriser les œuvres concrètes de la charité et de la réduire à un acte humanitaire générique, est réductrice. Mais, de l’autre, il est tout aussi limitant de soutenir une suprématie exagérée de la charité et de son activité, en pensant que les œuvres remplacent la foi. Pour une vie spirituelle saine, il est nécessaire de fuir aussi bien le fidéisme que l’activisme moraliste. L’existence chrétienne consiste en une ascension continue du mont de la rencontre avec Dieu pour ensuite redescendre, en portant l’amour et la force qui en dérivent, de manière à servir nos frères et sœurs avec le même amour que Dieu. Dans l’Ecriture nous voyons que le zèle des apôtres à annoncer l’Evangile, que suscite la foi, est étroitement lié à l’attention charitable du service envers les pauvres. Dans l’Eglise, contemplation et action, symbolisées d’une certaine manière par les figures évangéliques des sœurs Marie et Marthe, doivent coexister et s’intégrer. La priorité va toujours au rapport avec Dieu et le vrai partage évangélique doit s’enraciner dans la foi. Parfois, on tend en effet à circonscrire le terme de charité à la solidarité ou à la simple aide humanitaire. Il est important, en revanche, de rappeler que la plus grande œuvre de charité est justement l’évangélisation, c’est-à-dire le service de la Parole. Il n’y a pas d’action plus bénéfique, et donc charitable, envers le prochain que rompre le pain de la Parole de Dieu, le faire participer de la Bonne Nouvelle de l’Evangile, l’introduire dans la relation avec Dieu: l’évangélisation est la promotion la plus élevée et la plus complète de la personne humaine. Comme l’écrit Paul VI dans l’encyclique Populorum Progressio, le premier et principal facteur de développement est l’annonce du Christ. C’est la vérité originelle de l’amour de Dieu pour nous, vécue et annoncée, qui ouvre notre existence à accueillir cet amour et rend possible le développement intégral de l’humanité et de tout homme. En somme, tout part de l’Amour et tend à l’Amour. L’amour gratuit de Dieu nous est communiqué à travers l’annonce de l’Evangile. Si nous l’accueillons avec foi, nous recevons ce premier et indispensable contact avec le divin en mesure de nous faire aimer l’Amour, pour ensuite demeurer et croître dans cet Amour et le communiquer avec joie aux autres. A propos du rapport entre foi et œuvres de charité, une expression de l'épître aux Ephésiens résume peut-être leur corrélation de la meilleure des manières: C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, à cause de votre foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Cela ne vient pas de vos œuvres, il n’y a pas à en tirer orgueil. C’est Dieu qui nous a faits, il nous a créés en Jésus-Christ, pour que nos œuvres soient vraiment bonnes, conformes à la voie que Dieu a tracée pour nous et que nous devons suivre. On perçoit ici que toute l’initiative salvifique vient de Dieu, de sa grâce, de son pardon accueilli dans la foi. Mais cette initiative, loin de limiter notre liberté et notre responsabilité, les rend plutôt authentiques et les orientent vers les œuvres de charité. Celles-ci ne sont pas principalement le fruit de l’effort humain, dont tirer gloire, mais naissent de la foi elle-même, elles jaillissent de la grâce que Dieu offre en abondance. Une foi sans œuvres est comme un arbre sans fruits: Ces deux vertus s’impliquent réciproquement. Le Carême nous invite précisément, avec les dix indications traditionnelles pour la vie chrétienne, à alimenter la foi à travers une écoute plus attentive et prolongée de la Parole de Dieu et la participation aux sacrements, et, dans le même temps, à croître dans la charité, dans l’amour de Dieu et envers le prochain, également à travers les indications concrètes du jeûne, de la pénitence et de l’aumône.

4.       Priorité de la foi, primat de la charité.

Comme tout don de Dieu, foi et charité reconduisent à l’action de l’unique et même Esprit, qui crie en nous: Abbà! Père, et qui nous fait dire: Jésus est Seigneur et Maranatha! Don et réponse, la foi nous fait connaître la vérité du Christ comme Amour incarné et crucifié, adhésion pleine et parfaite à la volonté du Père et miséricorde divine infinie envers le prochain. La foi enracine dans le cœur et dans l’esprit la ferme conviction que précisément cet Amour est l’unique réalité victorieuse sur le mal et sur la mort. La foi nous invite à regarder vers l’avenir avec la vertu de l'espérance, dans l’attente confiante que la victoire de l’amour du Christ atteigne sa plénitude. De son côté, la charité nous fait entrer dans l’amour de Dieu manifesté dans le Christ, nous fait adhérer de manière personnelle et existentielle au don total de soi et sans réserve de Jésus au Père et à nos frères. En insufflant en nous la charité, l’Esprit Saint nous fait participer au don propre de Jésus: Filial envers Dieu et fraternel envers chaque homme. La relation qui existe entre ces deux vertus est semblable à celle entre les deux sacrements fondamentaux de l'Eglise que sont le baptême et l’Eucharistie. Le baptême (Sacramentum Fidei) précède l'Eucharistie (Sacramentum Caritatis), mais il est orienté vers celle-ci, qui constitue la plénitude du cheminement chrétien. De manière analogue, la foi précède la charité, mais se révèle authentique seulement si elle est couronnée par celle-ci. Tout part de l’humble accueil de la foi (se savoir aimé de Dieu, mais doit arriver à la vérité de la charité (savoir aimer Dieu et son prochain), qui demeure pour toujours, comme accomplissement de toutes les vertus. Dans le Carême, où nous nous préparons à célébrer l’événement de la Croix et de la Résurrection, dans lequel l'Amour de Dieu a racheté le monde et illuminé l’histoire, je vous souhaite à tous de vivre ce temps précieux en ravivant votre foi en Jésus-Christ, pour entrer dans son parcours d’amour envers le Père et envers chaque frère et sœur que nous rencontrons dans notre vie.
 

QUELQUES INDICATIONS POUR VIVRE CE TEMPS DE CAREME

 X  Prendre souvent du temps pour méditer sur l’Amour de Dieu pour nous. Cela devrait raviver notre foi car elle « prend conscience de l’amour de Dieu qui s’est révélé dans le cœur transpercé de Jésus sur la croix »

X  Nul ne peut prétendre être croyant et ne pas être charitable : Bénéficiaire de l’Amour de Dieu et y ayant répondu par la foi, nous devons en témoigner par la charité.

X  Pour développer notre charité nous devons nous appliquer aux œuvres de miséricordes :

« Les œuvres de miséricorde sont les actions charitables par lesquelles nous venons en aide à notre prochain dans ses nécessités corporelles et spirituelles (cf. Is 58,6-7 He 13,3). Instruire, conseiller, consoler, conforter sont des œuvres de miséricorde spirituelle, comme pardonner et supporter avec patience. Les œuvres de miséricorde corporelle consistent notamment à nourrir les affamés, loger les sans logis, vêtir les déguenillés, visiter les malades et les prisonniers, ensevelir les morts (cf. Mt 25,31-46). Parmi ces gestes, l'aumône faite aux pauvres (cf. Tb 4,5-11 Si 17,22) est un des principaux témoignages de la charité fraternelle: elle est aussi une pratique de justice qui plaît à Dieu (cf. Mt 6,2-4) » (CEC n°2447)

X  « La plus grande œuvre de charité est justement l’évangélisation, c’est-à-dire le service de la Parole » : Il nous faudra pendant se temps de Carême nous mettre à l’école de la Parole de Dieu et nous donner le devoir de l’annoncer autour de nous. Ce n’est pas forcément en organisant une campagne d’évangélisation mais en y recourant pour donner conseil au service, au marché… en y faisant allusion pour déconseiller ou déplorer telle ou telle attitude.

 
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mercredi 25 juillet 2012

LE SOIN DES MORTS COMME DONNEE ANTHROPOLOGIQUE UNIVERSELLE : ETUDE DES CAS DE TOBIT ET D’ANTIGONE

INTRODUCTION
L’humanité fait tous les jours, toutes les heures la triste et amère expérience de la mort. Evénement incontournable, source permanente d’angoisse, la mort et les inconnues qui l’accompagnent sont présentes dans tous les systèmes de pensée, dans toutes les religions et cultures. L’homme meurt et laisse impuissants ses proches. Elle sème dans les mentalités humaines des interrogations, des questionnements sur le devenir de l’être après la mort. Chacun n’en parle qu’en fonction des perspectives de sa culture, de sa foi, en fonction des vues de son esprit ou sur la base d’une soi-disant révélation, et s’en convainc plus ou moins. Mais, si ordinairement, toutes les conceptions sont unanimes que, lorsque sonne cette heure inéluctable, l’âme – la substance immatérielle – s’échappe du corps, laissant ce dernier inerte et sans vie, quelle attention et quel soin sont réservés à ce dernier voué à la corruption ? Ainsi, partout ailleurs et notamment dans les cultures africaines, la manière d’enterrer les morts, le soin accordé aux défunts inspirent de profondes réflexions. Voilà pourquoi le soin des morts s’illustre comme un débat aussi ancien que la mort elle-même. Il est entretenu diversement selon les cultures et les mentalités.
Ainsi, nous emprunterons trois dimensions diverses dans notre démarche d’investigations. Partant de l’observation de la réalité africaine, nous nous pencherons plus particulièrement sur l’importance des soins des morts dans le cadre des funérailles. Cette observation nous permettra de nous appesantir sur les exigences éthiques des cérémonies funéraires. En dernière étape, à partir des exemples éloquents pris dans l’histoire, nous ferons une analyse de cette réalité qui illustre non seulement le vécu de l’homme noir, mais de l’homme en général.
 
I. IMPORTANCE DES FUNERAILLES DANS LES MENTALITES AFRICAINES
Quand on meurt en Afrique, et partout d’ailleurs, ce n’est pas la fin de la vie, mais c’est alors que commence la vraie vie. A cet effet, « les obsèques sont l’expression de l’affection et de l’honneur que les parents témoignent pour leur défunt avant que sa mémoire ne s’efface, si tel devait en être le cas »[1]. A cet égard, il importe de lui faire des funérailles nécessaires et dignes qui tout d’abord l’insèrent dans le groupe des ancêtres, mais lui permettent de rester en communion avec les vivants pour qui il est devenu, du fait de sa mort, un ancêtre. Ces cérémonies en faveur du défunt impliquent des dispositions rituelles et culturelles auxquelles il faut sacrifier nécessairement.
 
A. Nécessité de culte
La mort demeure pour l’homme un mystère. Néanmoins, la croyance en une vie après la mort reste ferme. C’est pourquoi la mort est célébrée comme un rite qui, non seulement permet à l’homme d’obtenir une présence permanente du défunt au sein de la communauté, mais l’introduit dans cette vie de l’au-delà relativement approchée. Ce rite est d’autant plus nécessaire qu’il accompagne le défunt durant son voyage vers les ancêtres au sein desquels il devient néophyte, mais tout de même supérieur aux vivants. On voit bien que la mort d’un homme fait appel à des exigences cultuelles qu’il importe d’accomplir pour le bonheur du défunt dans sa survie au royaume des morts, mais aussi pour son intercession en faveur des vivants. Mais comme tous les rites à caractères religieux, les funérailles en dernier ressort visent à possibiliser, ou à assurer le bien-être à l’âme du défunt. Et de ce fait, plusieurs rites s’imposent. Ainsi par exemple, la tombe comme la dernière demeure du défunt, est aménagée avec un souci religieux qu’on va jusqu’à exprimer des mises en garde à l’endroit de son futur habitant[2]. Vient la toilette funèbre au cours de laquelle chaque famille ou individualité offre des coupes de tissus pour revêtir le mort. Les femmes, quelle que soit leur influence, assistent à la cérémonie, sinon, elles entonnent des mélopées reprises par toute l’assemblée, tandis que les pleureuses se fondent en prosopopées truculentes. Cette panoplie d’observances montre assez bien l’importance accordée à un corps.
Après la déposition en terre, c’est d’abord le pieds gauche, puis le pieds droit qui doivent y envoyer les premiers jets de terre, avant que les fossoyeurs ne le continuent de leur houe. Durant tout le temps que dureront les funérailles, toutes les activités cessent en faveur de celles-ci. Rien d’ordinaire ne doit être fait avec la main gauche. Car, on estime qu’au pays des morts, les mœurs sont contraires à celles des vivants. Ces mêmes funérailles situent le défunt dans le rôle qui désormais est le sien : gardien des vivants, il devient ipso facto le gardien du clan et de la collectivité ; esprit, il est appeler à conjurer tous les sorts susceptibles de nuire aux vivants de sa collectivité. Tout compte fait, il est désormais élevé plus grand que les vivants. Ainsi, manquer à ces honneurs, c’est attirer la courroux des dieux et des ancêtres sur les survivants, ce qui bien souvent apparaît dangereux et fatal.
Par ailleurs, s’abstenir volontairement ou négliger de procéder aux funérailles met généralement le clan ou la collectivité en de mauvaise position vis-à-vis des ancêtres. La pensée africaine sur ce point s’avère tonique et stimulante pour l’homme noir dont la sagesse populaire chante : « le mort n’est pas mort, il est retourné chez lui, parmi les siens, là-bas »[3]. Ceux-ci sont dits alors punir les leurs et attirent sur eux toutes sortes de malédictions. Cette influence négative se manifeste par la non-réussite dans les activités, les maladies, la naissance des enfants terribles, les apparitions étranges et même la mort brusque et inopinée.
En définitive, les funérailles selon les civilisations et les cultures ont une durée relativement longue : trois semaines, quarante et un jours, sept semaines, trois mois, sept mois, neuf mois… et peuvent aussi être reprises bien après comme devoir de mémoire. Quelque soit la durée, ces moments sont considérés comme période de grandes mobilisations de la collectivité et de prière en union avec les morts. Et ainsi, elle exprime le type de rapport que les vivants entretiennent avec les morts. C’est sous cet angle qu’il convient de considérer la signification des cérémonies et des rites qui suivent le décès. Malgré la pratique très respectueuse de ces cérémonies, l’aspect culturel n’est pas à ignorer.
 
B. Nécessité de culture
S’il y a une circonstance qui demande de grandes dépenses, c’est bien celle des funérailles. C’est l’un des premiers soucis de la famille éplorée. Un décès de vieillard ou de vieille femme en Afrique doit être célébrée avec solennité à tout prix et de cela, les parents sont bien conscients. Tout d’abord, lorsqu’un décès survient, c’est l’occasion des retrouvailles. Malgré l’angoisse et le sentiment sombre de l’atmosphère, on note des mouvements dans toutes les directions. Des réunions se succèdent et se prolongent même tard dans la nuit, si elles ne durent pas jusqu’au petit matin. Parfois, on assiste à des tensions entre parents relatives aux lieux des funérailles. Ou on substitue aux exigences cultuelles traditionnelles celles relatives à l’appartenance religieuse : la messe d’inhumation. Ces tensions opposent souvent les grands parents, garants de la tradition aux enfants et petits enfants nourris de la modernité et de la volonté de tout changer. Ou tout simplement, on voudrait profiter de ces funérailles pour vanter sa richesse. Cette volonté d’organisation qui n’est rien d’autre qu’un égocentrisme qui ne dit pas son nom met le promoteur au premier plan des cérémonies. Dans cette perspective, ces rites funéraires, ces chants et ces condoléances nous font découvrir ce noble désir qui habite le cœur de l’homme africain, ce désir qui consiste à vivre toujours, même au-delà des frontières de ce monde. Si l’ambiance de recueillement est maintenue dans les esprits, elle s’estompe aussitôt après l’enterrement pour laisser place aux réjouissances et aux festivités qui entrent aussi en ligne de compte des funérailles. Les cérémonies sont organisées pour une durée relativement longue. Les grandes affluences des gens dans la maison mortuaire durant les obsèques sont des moments de soutien moral et matériel à l’endroit des endeuillés. On reste avec eux pendant des jours, mangeant, buvant, veillant, chantant pour leur faire oublier les soucis. Les chants, les danses, l’évasion dans l’alcoolisme, l’ambiance de joie, tout cela est organisée comme pour s’empêcher d’entendre sonner un éventuel glas de la mort. L’accent est surtout mis sur le culturel, où les groupes folkloriques, tous les soirs, se donnent en spectacle, soit pour chanter ou mépriser la mort, soit pour louer les prouesses du disparu, soit pour toute autre animation pour chanter et louer la vie, car « mourir, en dernier ressort, c’est naître à l’Au-delà. C’est rejoindre les ascendants qui forment là-bas la dimension invisible de la famille, du clan ou de la tribu »[4].
Après l’enterrement, une grande réjouissance commence comme pour manifester son contentement que le disparu est bien accueilli par les ancêtres. Ainsi, les vivants doivent marquer cet événement de façon festive par des sacrifices tout en restant solidaires dans l’épreuve. Ils croient fermement que leurs morts ne rentrent pas dans l’oubli, dans le néant, mais ils rentrent dans la vie. Et pour que ceux qui meurent puisent trouver cette vie entière, et entrer dans la compagnie des ancêtres, les vivants font tout leur possible pour s’acquitter du devoir qui leur incombe, celui de faire des funérailles qui pour les africains sont les moyens par lesquels leurs morts entrent dans la vie de l’Au-delà.
 
II. LES EXIGENCES ETHIQUES DES FUNERAILLES
L’éthique est l’épine dorsale de toute culture. Elle se rapporte, pour l’usage social, aux mœurs et aux coutumes qui sédimentent les finalités et les valeurs inhérentes aux actions humaines. Dans cette perspective, l’importance accordée aux morts apparaît comme un point saillant dans toutes les mentalités humaines. Cependant, elle a des aspects relatifs, c’est-à-dire liés aux modes de vie des peuples.
Tout d’abord, l’africain est un être de communion. Il partage naturellement une solidarité avec les siens, proches ou lointains. Cette solidarité est beaucoup plus renforcée, à l’occasion des grands rassemblements de la collectivité dont les funérailles. En effet, lorsqu’un décès survient en Afrique, c’est l’occasion des grands rassemblements et des retrouvailles. Non seulement, la famille éplorée est présente, mais encore les membres des familles alliées par les noces ou quelque autre lien viennent élargir le cercle des compatissants. Il faut noter surtout la solidarité et l’esprit de communion qui se remarquent chez l’Africain lors des funérailles. L’exemple des collectes faites ou les cotisations pour l’organisation du rituel des morts sont assez illustratives pour nous édifier.
Ensuite, dans nombre de famille ou de collectivité, la toilette funèbre est considérée comme un rituel. Mais de plus en plus, cette toilette tend à disparaître car, les funérariums s’illustrent assez compétents pour de tels actes. En effet, le danger couru au contact d’un cadavre est très grave, avec des conséquences énormes. C’est pourquoi, même le rituel de la toilette funèbre n’est réservé qu’à quelques hommes, rigoureusement deux. Elle n’est même pas l’affaire du chef de la collectivité. Il est même recommandée que cette toilette soit plutôt l’affaire des spécialisés, car l’entretien et la toilette d’un cadavre ne relève pas d’une simple compétence d’homme. Par ailleurs, il est vrai que le contact avec le défunt est perçu comme impureté. Mais bien au-delà, toute la maison mortuaire est frappée d’impureté pendant tout le temps que dureront les cérémonies.
Le devoir de mémoire apparaît aussi comme un acte de reconnaissance et de gratitude pour les faveurs accordées par les morts. En effet, le devoir de mémoire est l’acte de se souvenir de nos parents, de nos proches, de nos amis qui ont été fauchés par la mort. Nous avons la certitude qu’ils toujours avec nous, dans la nature, ou du moins, c’est ce que Birago DIOP nous apprend pour le compte de son poème panthéiste (Souffle). Leur mémoire s’impose à nous à travers le panthéon, les monuments aux morts, et même les photos que nous gardons encore d’eux car, « par la mémoire, on ressuscite symboliquement les morts »[5]. Ces jours de souvenirs ou d’anniversaires à l’intention de nos morts cachent une intention d’entretien et de considération intense, qui établit même chez certains une communion d’esprit avec le disparu. Cette œuvre de retournement permet de revivre le passé et de s’y planter[6], à travers des comportements et des représentations, manifestant ainsi la conception non seulement africaine, mais universelle d’une grande attention vouée aux morts et aux défunts.

III. ETUDE DE QUELQUES CAS EDIFIANTS DANS L’HISTOIRE
La considération vouée aux défunts ne relève pas d’une quelconque imagination des hommes. Elle s’impose comme devoir des vivants envers les morts. Elle est considérée comme un signe de malédiction, quand elle est négligée volontairement. L’histoire nous rapporte des exemples éloquents de l’observance stricte des honneurs funèbres qui, dans les mentalités humaines ne relève pas d’une juridiction humaine.
       
            A. Tobit[7]
Le soin des morts ou l’idée des funérailles s’illustre bien à travers les pages des Saintes Ecritures à diverses occasions. Le livre de Tobit à cet effet nous en donne une illustration. Il raconte en quatorze chapitres l’histoire d’un pieux Israélite appelé Tobit – ce qui en hébreu, veut dire : « Yahvé est mon Libérateur » –, de son fils, et de sa bru Sarra, lesquels ayant toujours eu confiance en Dieu au milieu des plus grandes tribulations, furent comblés des plus insignes faveurs[8].
Le héros du livre est un Israélite de la tribu de Nephtali[9], emmené captif au temps de Salmanasar[10], roi d’Assyrie. Les soins donnés par Tobit à la sépulture de ses frères, victimes de la persécution, lui attirèrent la colère du roi Sennachérib[11] qui ordonna de le mettre à mort et de lui enlever tous ses biens. Le massacre du tyran par ses propres fils permit à Tobit de rentrer dans sa maison et de recouvrer tous ses biens. Et de nouveau, malgré le danger couru, il continua d’assurer la sépulture aux cadavres de ceux de ses frères qui avaient été tués.
A la base de la vie si édifiante de Tobit, il y a la crainte de Dieu. C’est elle en effet qui l’inspire aussi bien dans l’observation attentive de la loi divine que dans son dévouement pour le prochain (2, 2.14 ; 4, 23). La fidélité à la maison de David, à Jérusalem et à son sanctuaire (1, 2.6) formant un tout inséparable, n’était pas le fait des membres de la tribu de Nephtali, celle de Tobit, car tous sacrifiaient aux veaux d’or dressés par Jéroboam sur la montagne de Galilée (1, 4-5). De même, l’exercice de la charité envers les affligés de sa parenté et plus spécialement la sépulture assurée aux victimes de la vengeance de Sennachérib exposaient Tobit aux pires châtiments (1, 21-22). En réalité, si les funérailles des morts dont les cadavres risquaient d’être privés de sépulture sont ici mentionnées pour la première fois dans l’Ecriture Sainte, comme une œuvre de miséricorde, déjà dans les temps anciens, elles étaient regardées comme indispensables à l’honneur et au repos de l’âme des défunts (Is. 14, 19) et devaient être assurées, à défaut des parents, par quelque membre de la tribu s’employant à cette œuvre de miséricorde (Ez. 39, 13s ; Eccl. 38, 16 ; cf. Eccl. 7, 33). La recommandation de Tobit à son fils Tobit de placer son pain et son vin sur le tombeau du juste, frange panem et effunde vinum[12] (ancienne version latine, 4, 17), ne saurait s’entendre ni de l’offrande de sacrifice aux morts, ni même d’une offrande de nourriture au mort selon la pratique égyptienne et cananéenne d’approvisionner les morts de nourriture et de boisson[13]. La rigoureuse observation des moindres préceptes de la Loi dont témoigne la conduite de Tobit contredit de telles explications. Il s’agit tout simplement de la coutume d’offrir à la famille en deuil, réunie à la maison du défunt, des pains ou quelque autre nourriture en témoignage de sympathie (Cf. Jr. 16, 7 ; Ez. 24, 17 ; Eccl. 7, 33). La suite du verset confirme d’ailleurs cette interprétation en recommandant de ne pas agir de la même façon à l’égard du pécheur. Enfin, Tobit lui-même n’hésite pas à réclamer à son fils de dignes funérailles « Enterre-moi comme il convient » (Tb. 4, 3)[14].
En réalité, le comportement de Tobit, malgré son caractère étrange et extraordinaire, n’est guère sans fondements. Selon le prophète Jérémie, l’absence de sépulture était déjà considérée comme une malédiction. Elle était l’une des fruits amers des déviations religieuses en Israël (Jr. 8, 2 ; 9, 21 ; 22, 18-19 ; 36, 30). Néanmoins, bien avant l’homme de Dieu, existait certainement. Ainsi, Abraham fit les funérailles à sa femme Sara lorsqu’elle mourut dans le pays de Canaan (Gn. 23.1-20). De même, Joseph n’hésite pas à donner l’ordre pour qu’on organise les funérailles pour son père Jacob (Gn. 50.1-14). Ces cérémonies funéraires duraient régulièrement sept jours (Jdt. 16, 24 ; Gn. 50, 10 ; 1S. 31, 13) durant lesquels on se lamentait bruyamment, on allait nu-tête et nu-pieds (2S 15.30), le visage partiellement voilé (2S 19,5) ; il semble aussi qu’on mangeait la nourriture offerte par les parents ou les voisins (Jr. 16, 7), peut-être pour ne pas se souiller avec des aliments rendus impurs par la présence du cadavre (Nb 19,11-13). Toutes ces ordonnances ont résisté au temps et se sont de plus en plus renforcées à travers les générations. Ainsi, Tobit n’a pas voulu se passer de ces prescriptions coutumières même si quelquefois, leur observation mettait sa vie en danger.
 
              B. Antigone [15]
Œdipe[16], est le fils redouté et redoutable de Laïus et de Jocaste. Sur la route de la Boétie où il s’enfuyait pour échapper à la prophétie de la Pythie, il tue son père, réalisant tout de même le crime pour lequel il s’enfuyait. Après avoir triomphé du Sphinx[17], il est ramené victorieux à Thèbes où il épouse la reine Jocaste. Ainsi fut réalisée la deuxième partie de la prédiction pythienne : Œdipe épousait sa mère. De cette union incestueuse naîtront l’un après l’autre Etéocle, Polynice et Antigone. Dans un duel qui les opposa au sujet du trône laissé par leur père[18], les deux frères s’entretuent. Créon leur oncle, le frère de leur mère Jocaste, qui exerce désormais le pouvoir sur Thèbes, prononce un décret : on refusera les honneurs funèbres à Polynice, le traître à sa patrie[19]. Son cadavre servira de pâture aux animaux. Cependant, Antigone, la sœur de Polynice, défie le Souverain ; elle accomplit les rites funèbres à ses frères. Malheureusement, elle n’échappe pas aux yeux vigilants des espions qui la dénoncent au roi. Conduite vers Créon, elle explique sa conduite : les rites à l’égard des morts ne relèvent pas de sa compétence. Créon qui voit dans la désobéissance civile un risque d’anarchie, maintient son exigence et condamne Antigone à mort, conformément aux termes de son décret.
Hémon le fils du souverain, qui était alors le fiancé de Antigone, tente en vain d’infléchir le roi en lui laissant entendre que le peuple approuve le comportement de la jeune fille, celui des honneurs rendus aux morts. Ce sera ensuite au tour du devin Tirésias de faire part des présages qui laissent clairement voir de quel côté sont les dieux dans cette affaire. Malgré ces arguments non moins négligeables, Créon met d’abord cette interprétation sur le compte d’un complot ; puis, quand le devin lui annonce les conséquences funestes de son obstination, il se laisse fléchir. Il décide de rendre lui-même les honneurs funèbres à Polynice avant de faire délivrer Antigone. Pendant qu’il accomplit les rites, celle-ci, emmurée vivante dans une caverne, se pend ; Hémon son fiancé se suicide sur son corps, sous les yeux du souverain accouru ; quand elle apprendra la mort de son fils, Eurydice se donnera également la mort.
A considérer ses conséquences ultimes, cette scène s’attache à la logique du comportement de Créon en habit de « Tyran », d’homme investi d’un pouvoir qui n’est soumis à aucun organe de contrôle. En tant que tel, Créon n’agit pas en despote ; son décret est conforme au point de vue d’un souverain qui considère qu’une cité ne peut avoir d’obligation à l’égard d’un homme qui avait l’intention de la détruire. Face à lui se lève Antigone pour défendre les obligations dues aux morts : celles-ci ne relèvent pas d’une juridiction humaine, mais appartiennent au domaine d’Hadès. Dans cette optique, Antigone est la seule qui agisse contre le décret. Remarquons tout de même que sa sœur Ismène refusa de participer à son action, mais elle se fait toutefois sa complice en ne la dénonçant pas.
 
CONCLUSION
Nous avons essayé de rendre compte de la mentalité qui témoigne d’une grande attention vouée aux morts. En Afrique surtout où les morts sont considérés comme des ancêtres, les honneurs funèbres sont comme des liaisons entre le mort et ceux qu’il a quittés. Ainsi, après avoir constaté que « partout dans le monde le défunt a été l’objet d’attentions particulières », et que par ailleurs tout cela représente l’effort des sociétés pour « lutter contre les effets dissolvants de la morts », le Professeur Louis Vincent THOMAS, qui a souvent étudié la mort chez les populations d’Afrique, conclut que c’est plutôt une marque de respect, de grande considération et de vénération[20]. Epousant son point de vue, retenons que si l’instant de la mort constitue un hiatus entre la vie physique et celle de l’au-delà, par-delà le fossé de la tombe, les funérailles établissent une passerelle entre les vivants et leurs morts. Et quelque soit la valeur ou l’importance du défunt au sein du clan ou de la collectivité, quelle que soit la moralité dont il a fait montre de son vivant, son cadavre mérite des honneurs. C’est ce que nous avons prouvé à travers les exemples de Tobit et de Antigone qui, l’un et l’autre enseignent à travers leurs comportement méritoires, l’importance des rites funèbres.
Ceux-ci en fait relèvent d’une juridiction divine et s’opposent aux lois d’Etat. Dans le cas de Tobit, nous avons l’exemple d’une fidélité aux lois de Yahveh, fidélité qui ne démentit pas durant sa captivité. Et malgré le danger qu’il encourait, il s’employait à une attitude digne qui le conduisait à la sépulture de ses frères, victimes de leur vengeance. Antigone pour sa part, incarne le respect des lois divines et s’oppose à son oncle, prototype de la raison d’Etat. Autrement dit, Antigone et Tobit renchérissent de façon explicitent les deux premières parties de notre développement. Au demeurant, les comportements et les attitudes qu’inspirent aujourd’hui un défunt sont bien légitimes et ne peuvent être interprétés autrement. Car, rendre les derniers honneurs à un proche, un parent ou autre est une valeur et doit être considéré comme telle. Il est propre à chaque civilisation, à chaque peuple et culture.
 
Rodin Chrysal SEDAGONDJI


[1] P. DEGUENON, L’Au-delà Maxi-Agonlin en dialogue avec la foi chrétienne, Mémoire de fin de formation en cycle de théologie, Saint Gall – Ouidah, Janvier 2001, p. 8.
[2] Cf. P. DEGUENON, L’Au-delà Maxi-Agonlin en dialogue avec la foi chrétienne, Mémoire de fin de formation en cycle de théologie, Saint Gall – Ouidah, Janvier 2001.
[3] M-J. AGOSSOU, op. cit., p. 77.
[4] M-J. MEDEWALE, Christianisme africain : Une fraternité au-delà de l’ethnie, Paris, Karthala, 1987, p. 77.
[5] V. STRAPPAZZON, Communications avec l’Au-delà, Paris, Droguet & Ardant, 1991, p. 23.
[6] Cf. V. STRAPPAZZON, Communications avec l’Au-delà, Paris, Droguet & Ardant, 1991, p. 11.
[7] Toutes les références bibliques sont celles de la Ste Bbible traduite par L. PIROT – A. CLAMER, tomes II et IV, Paris, Letouzey et Ané.
[8] On lira avec grand intérêt le livre de Tobit dans la Bible. Il est classé parmi les livres deutérocanoniques.
[9] C’est l’une des douze tribus d’Israël, dont fait partie Tobit.
[10] Roi d’Assyrie en 726-722 av. Jésus-Christ.
[11] Roi d’Assyrie, un des successeur de Salmanasar, 704-681 av. Jésus-Christ
[12] Cf. L. PIROT – A. CLAMER, La Sainte Bible : Paralipomènes – Esdras-Néhémie – Tobit – Judith – Esther – Job, Tome IV, Paris, Letouzey et Ané, 1949, p.409
[13] Cf. L. PIROT – A. CLAMER, La Sainte Bible : Lévitique – Nombres – Deutéronome, Tome II, Paris, Letouzey et Ané, 1946, p.677
[14] L. PIROT – A. CLAMER, La Sainte Bible : Paralipomènes – Esdras-Néhémie – Tobit – Judith – Esther – Job, Tome IV, Paris, Letouzey et Ané, 1949, p.410
[15] Cf. Sophocle, Les Trachiniennes – Antigone, Paris, « Les Belles Lettres », 1962 ; E. GENEST, Contes et Légendes Mythologiques, Nathan, 1929.
[16] Enfant terrible, prédit par l’oracle de la Pythie à Laïus et Jocaste, qui tuera son père et épousera sa mère. Il réalisera, malgré lui, les prédications de l’Oracle.
[17] Monstre hybride de l’ancienne Egypte, sous l’aspect d’un lion ailé à buste et tête de femme. Œdipe triompha de lui.
[18] Œdipe, ayant découvert qu’il était l’époux de celle qui l’avait mis au monde, sa mère, saisit les agrafes de son manteau et se creva les yeux.
[19] Il était interdit à Athènes d’ensevelir les traîtres dans le sol de leur patrie.
[20] L-V. THOMAS, Art. « Mort » dans Encyclopédia Universalis, cité par V. STRAPPAZZON, op. cit., p. 14.

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