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mercredi 25 juillet 2012

LE SOIN DES MORTS COMME DONNEE ANTHROPOLOGIQUE UNIVERSELLE : ETUDE DES CAS DE TOBIT ET D’ANTIGONE

INTRODUCTION
L’humanité fait tous les jours, toutes les heures la triste et amère expérience de la mort. Evénement incontournable, source permanente d’angoisse, la mort et les inconnues qui l’accompagnent sont présentes dans tous les systèmes de pensée, dans toutes les religions et cultures. L’homme meurt et laisse impuissants ses proches. Elle sème dans les mentalités humaines des interrogations, des questionnements sur le devenir de l’être après la mort. Chacun n’en parle qu’en fonction des perspectives de sa culture, de sa foi, en fonction des vues de son esprit ou sur la base d’une soi-disant révélation, et s’en convainc plus ou moins. Mais, si ordinairement, toutes les conceptions sont unanimes que, lorsque sonne cette heure inéluctable, l’âme – la substance immatérielle – s’échappe du corps, laissant ce dernier inerte et sans vie, quelle attention et quel soin sont réservés à ce dernier voué à la corruption ? Ainsi, partout ailleurs et notamment dans les cultures africaines, la manière d’enterrer les morts, le soin accordé aux défunts inspirent de profondes réflexions. Voilà pourquoi le soin des morts s’illustre comme un débat aussi ancien que la mort elle-même. Il est entretenu diversement selon les cultures et les mentalités.
Ainsi, nous emprunterons trois dimensions diverses dans notre démarche d’investigations. Partant de l’observation de la réalité africaine, nous nous pencherons plus particulièrement sur l’importance des soins des morts dans le cadre des funérailles. Cette observation nous permettra de nous appesantir sur les exigences éthiques des cérémonies funéraires. En dernière étape, à partir des exemples éloquents pris dans l’histoire, nous ferons une analyse de cette réalité qui illustre non seulement le vécu de l’homme noir, mais de l’homme en général.
 
I. IMPORTANCE DES FUNERAILLES DANS LES MENTALITES AFRICAINES
Quand on meurt en Afrique, et partout d’ailleurs, ce n’est pas la fin de la vie, mais c’est alors que commence la vraie vie. A cet effet, « les obsèques sont l’expression de l’affection et de l’honneur que les parents témoignent pour leur défunt avant que sa mémoire ne s’efface, si tel devait en être le cas »[1]. A cet égard, il importe de lui faire des funérailles nécessaires et dignes qui tout d’abord l’insèrent dans le groupe des ancêtres, mais lui permettent de rester en communion avec les vivants pour qui il est devenu, du fait de sa mort, un ancêtre. Ces cérémonies en faveur du défunt impliquent des dispositions rituelles et culturelles auxquelles il faut sacrifier nécessairement.
 
A. Nécessité de culte
La mort demeure pour l’homme un mystère. Néanmoins, la croyance en une vie après la mort reste ferme. C’est pourquoi la mort est célébrée comme un rite qui, non seulement permet à l’homme d’obtenir une présence permanente du défunt au sein de la communauté, mais l’introduit dans cette vie de l’au-delà relativement approchée. Ce rite est d’autant plus nécessaire qu’il accompagne le défunt durant son voyage vers les ancêtres au sein desquels il devient néophyte, mais tout de même supérieur aux vivants. On voit bien que la mort d’un homme fait appel à des exigences cultuelles qu’il importe d’accomplir pour le bonheur du défunt dans sa survie au royaume des morts, mais aussi pour son intercession en faveur des vivants. Mais comme tous les rites à caractères religieux, les funérailles en dernier ressort visent à possibiliser, ou à assurer le bien-être à l’âme du défunt. Et de ce fait, plusieurs rites s’imposent. Ainsi par exemple, la tombe comme la dernière demeure du défunt, est aménagée avec un souci religieux qu’on va jusqu’à exprimer des mises en garde à l’endroit de son futur habitant[2]. Vient la toilette funèbre au cours de laquelle chaque famille ou individualité offre des coupes de tissus pour revêtir le mort. Les femmes, quelle que soit leur influence, assistent à la cérémonie, sinon, elles entonnent des mélopées reprises par toute l’assemblée, tandis que les pleureuses se fondent en prosopopées truculentes. Cette panoplie d’observances montre assez bien l’importance accordée à un corps.
Après la déposition en terre, c’est d’abord le pieds gauche, puis le pieds droit qui doivent y envoyer les premiers jets de terre, avant que les fossoyeurs ne le continuent de leur houe. Durant tout le temps que dureront les funérailles, toutes les activités cessent en faveur de celles-ci. Rien d’ordinaire ne doit être fait avec la main gauche. Car, on estime qu’au pays des morts, les mœurs sont contraires à celles des vivants. Ces mêmes funérailles situent le défunt dans le rôle qui désormais est le sien : gardien des vivants, il devient ipso facto le gardien du clan et de la collectivité ; esprit, il est appeler à conjurer tous les sorts susceptibles de nuire aux vivants de sa collectivité. Tout compte fait, il est désormais élevé plus grand que les vivants. Ainsi, manquer à ces honneurs, c’est attirer la courroux des dieux et des ancêtres sur les survivants, ce qui bien souvent apparaît dangereux et fatal.
Par ailleurs, s’abstenir volontairement ou négliger de procéder aux funérailles met généralement le clan ou la collectivité en de mauvaise position vis-à-vis des ancêtres. La pensée africaine sur ce point s’avère tonique et stimulante pour l’homme noir dont la sagesse populaire chante : « le mort n’est pas mort, il est retourné chez lui, parmi les siens, là-bas »[3]. Ceux-ci sont dits alors punir les leurs et attirent sur eux toutes sortes de malédictions. Cette influence négative se manifeste par la non-réussite dans les activités, les maladies, la naissance des enfants terribles, les apparitions étranges et même la mort brusque et inopinée.
En définitive, les funérailles selon les civilisations et les cultures ont une durée relativement longue : trois semaines, quarante et un jours, sept semaines, trois mois, sept mois, neuf mois… et peuvent aussi être reprises bien après comme devoir de mémoire. Quelque soit la durée, ces moments sont considérés comme période de grandes mobilisations de la collectivité et de prière en union avec les morts. Et ainsi, elle exprime le type de rapport que les vivants entretiennent avec les morts. C’est sous cet angle qu’il convient de considérer la signification des cérémonies et des rites qui suivent le décès. Malgré la pratique très respectueuse de ces cérémonies, l’aspect culturel n’est pas à ignorer.
 
B. Nécessité de culture
S’il y a une circonstance qui demande de grandes dépenses, c’est bien celle des funérailles. C’est l’un des premiers soucis de la famille éplorée. Un décès de vieillard ou de vieille femme en Afrique doit être célébrée avec solennité à tout prix et de cela, les parents sont bien conscients. Tout d’abord, lorsqu’un décès survient, c’est l’occasion des retrouvailles. Malgré l’angoisse et le sentiment sombre de l’atmosphère, on note des mouvements dans toutes les directions. Des réunions se succèdent et se prolongent même tard dans la nuit, si elles ne durent pas jusqu’au petit matin. Parfois, on assiste à des tensions entre parents relatives aux lieux des funérailles. Ou on substitue aux exigences cultuelles traditionnelles celles relatives à l’appartenance religieuse : la messe d’inhumation. Ces tensions opposent souvent les grands parents, garants de la tradition aux enfants et petits enfants nourris de la modernité et de la volonté de tout changer. Ou tout simplement, on voudrait profiter de ces funérailles pour vanter sa richesse. Cette volonté d’organisation qui n’est rien d’autre qu’un égocentrisme qui ne dit pas son nom met le promoteur au premier plan des cérémonies. Dans cette perspective, ces rites funéraires, ces chants et ces condoléances nous font découvrir ce noble désir qui habite le cœur de l’homme africain, ce désir qui consiste à vivre toujours, même au-delà des frontières de ce monde. Si l’ambiance de recueillement est maintenue dans les esprits, elle s’estompe aussitôt après l’enterrement pour laisser place aux réjouissances et aux festivités qui entrent aussi en ligne de compte des funérailles. Les cérémonies sont organisées pour une durée relativement longue. Les grandes affluences des gens dans la maison mortuaire durant les obsèques sont des moments de soutien moral et matériel à l’endroit des endeuillés. On reste avec eux pendant des jours, mangeant, buvant, veillant, chantant pour leur faire oublier les soucis. Les chants, les danses, l’évasion dans l’alcoolisme, l’ambiance de joie, tout cela est organisée comme pour s’empêcher d’entendre sonner un éventuel glas de la mort. L’accent est surtout mis sur le culturel, où les groupes folkloriques, tous les soirs, se donnent en spectacle, soit pour chanter ou mépriser la mort, soit pour louer les prouesses du disparu, soit pour toute autre animation pour chanter et louer la vie, car « mourir, en dernier ressort, c’est naître à l’Au-delà. C’est rejoindre les ascendants qui forment là-bas la dimension invisible de la famille, du clan ou de la tribu »[4].
Après l’enterrement, une grande réjouissance commence comme pour manifester son contentement que le disparu est bien accueilli par les ancêtres. Ainsi, les vivants doivent marquer cet événement de façon festive par des sacrifices tout en restant solidaires dans l’épreuve. Ils croient fermement que leurs morts ne rentrent pas dans l’oubli, dans le néant, mais ils rentrent dans la vie. Et pour que ceux qui meurent puisent trouver cette vie entière, et entrer dans la compagnie des ancêtres, les vivants font tout leur possible pour s’acquitter du devoir qui leur incombe, celui de faire des funérailles qui pour les africains sont les moyens par lesquels leurs morts entrent dans la vie de l’Au-delà.
 
II. LES EXIGENCES ETHIQUES DES FUNERAILLES
L’éthique est l’épine dorsale de toute culture. Elle se rapporte, pour l’usage social, aux mœurs et aux coutumes qui sédimentent les finalités et les valeurs inhérentes aux actions humaines. Dans cette perspective, l’importance accordée aux morts apparaît comme un point saillant dans toutes les mentalités humaines. Cependant, elle a des aspects relatifs, c’est-à-dire liés aux modes de vie des peuples.
Tout d’abord, l’africain est un être de communion. Il partage naturellement une solidarité avec les siens, proches ou lointains. Cette solidarité est beaucoup plus renforcée, à l’occasion des grands rassemblements de la collectivité dont les funérailles. En effet, lorsqu’un décès survient en Afrique, c’est l’occasion des grands rassemblements et des retrouvailles. Non seulement, la famille éplorée est présente, mais encore les membres des familles alliées par les noces ou quelque autre lien viennent élargir le cercle des compatissants. Il faut noter surtout la solidarité et l’esprit de communion qui se remarquent chez l’Africain lors des funérailles. L’exemple des collectes faites ou les cotisations pour l’organisation du rituel des morts sont assez illustratives pour nous édifier.
Ensuite, dans nombre de famille ou de collectivité, la toilette funèbre est considérée comme un rituel. Mais de plus en plus, cette toilette tend à disparaître car, les funérariums s’illustrent assez compétents pour de tels actes. En effet, le danger couru au contact d’un cadavre est très grave, avec des conséquences énormes. C’est pourquoi, même le rituel de la toilette funèbre n’est réservé qu’à quelques hommes, rigoureusement deux. Elle n’est même pas l’affaire du chef de la collectivité. Il est même recommandée que cette toilette soit plutôt l’affaire des spécialisés, car l’entretien et la toilette d’un cadavre ne relève pas d’une simple compétence d’homme. Par ailleurs, il est vrai que le contact avec le défunt est perçu comme impureté. Mais bien au-delà, toute la maison mortuaire est frappée d’impureté pendant tout le temps que dureront les cérémonies.
Le devoir de mémoire apparaît aussi comme un acte de reconnaissance et de gratitude pour les faveurs accordées par les morts. En effet, le devoir de mémoire est l’acte de se souvenir de nos parents, de nos proches, de nos amis qui ont été fauchés par la mort. Nous avons la certitude qu’ils toujours avec nous, dans la nature, ou du moins, c’est ce que Birago DIOP nous apprend pour le compte de son poème panthéiste (Souffle). Leur mémoire s’impose à nous à travers le panthéon, les monuments aux morts, et même les photos que nous gardons encore d’eux car, « par la mémoire, on ressuscite symboliquement les morts »[5]. Ces jours de souvenirs ou d’anniversaires à l’intention de nos morts cachent une intention d’entretien et de considération intense, qui établit même chez certains une communion d’esprit avec le disparu. Cette œuvre de retournement permet de revivre le passé et de s’y planter[6], à travers des comportements et des représentations, manifestant ainsi la conception non seulement africaine, mais universelle d’une grande attention vouée aux morts et aux défunts.

III. ETUDE DE QUELQUES CAS EDIFIANTS DANS L’HISTOIRE
La considération vouée aux défunts ne relève pas d’une quelconque imagination des hommes. Elle s’impose comme devoir des vivants envers les morts. Elle est considérée comme un signe de malédiction, quand elle est négligée volontairement. L’histoire nous rapporte des exemples éloquents de l’observance stricte des honneurs funèbres qui, dans les mentalités humaines ne relève pas d’une juridiction humaine.
       
            A. Tobit[7]
Le soin des morts ou l’idée des funérailles s’illustre bien à travers les pages des Saintes Ecritures à diverses occasions. Le livre de Tobit à cet effet nous en donne une illustration. Il raconte en quatorze chapitres l’histoire d’un pieux Israélite appelé Tobit – ce qui en hébreu, veut dire : « Yahvé est mon Libérateur » –, de son fils, et de sa bru Sarra, lesquels ayant toujours eu confiance en Dieu au milieu des plus grandes tribulations, furent comblés des plus insignes faveurs[8].
Le héros du livre est un Israélite de la tribu de Nephtali[9], emmené captif au temps de Salmanasar[10], roi d’Assyrie. Les soins donnés par Tobit à la sépulture de ses frères, victimes de la persécution, lui attirèrent la colère du roi Sennachérib[11] qui ordonna de le mettre à mort et de lui enlever tous ses biens. Le massacre du tyran par ses propres fils permit à Tobit de rentrer dans sa maison et de recouvrer tous ses biens. Et de nouveau, malgré le danger couru, il continua d’assurer la sépulture aux cadavres de ceux de ses frères qui avaient été tués.
A la base de la vie si édifiante de Tobit, il y a la crainte de Dieu. C’est elle en effet qui l’inspire aussi bien dans l’observation attentive de la loi divine que dans son dévouement pour le prochain (2, 2.14 ; 4, 23). La fidélité à la maison de David, à Jérusalem et à son sanctuaire (1, 2.6) formant un tout inséparable, n’était pas le fait des membres de la tribu de Nephtali, celle de Tobit, car tous sacrifiaient aux veaux d’or dressés par Jéroboam sur la montagne de Galilée (1, 4-5). De même, l’exercice de la charité envers les affligés de sa parenté et plus spécialement la sépulture assurée aux victimes de la vengeance de Sennachérib exposaient Tobit aux pires châtiments (1, 21-22). En réalité, si les funérailles des morts dont les cadavres risquaient d’être privés de sépulture sont ici mentionnées pour la première fois dans l’Ecriture Sainte, comme une œuvre de miséricorde, déjà dans les temps anciens, elles étaient regardées comme indispensables à l’honneur et au repos de l’âme des défunts (Is. 14, 19) et devaient être assurées, à défaut des parents, par quelque membre de la tribu s’employant à cette œuvre de miséricorde (Ez. 39, 13s ; Eccl. 38, 16 ; cf. Eccl. 7, 33). La recommandation de Tobit à son fils Tobit de placer son pain et son vin sur le tombeau du juste, frange panem et effunde vinum[12] (ancienne version latine, 4, 17), ne saurait s’entendre ni de l’offrande de sacrifice aux morts, ni même d’une offrande de nourriture au mort selon la pratique égyptienne et cananéenne d’approvisionner les morts de nourriture et de boisson[13]. La rigoureuse observation des moindres préceptes de la Loi dont témoigne la conduite de Tobit contredit de telles explications. Il s’agit tout simplement de la coutume d’offrir à la famille en deuil, réunie à la maison du défunt, des pains ou quelque autre nourriture en témoignage de sympathie (Cf. Jr. 16, 7 ; Ez. 24, 17 ; Eccl. 7, 33). La suite du verset confirme d’ailleurs cette interprétation en recommandant de ne pas agir de la même façon à l’égard du pécheur. Enfin, Tobit lui-même n’hésite pas à réclamer à son fils de dignes funérailles « Enterre-moi comme il convient » (Tb. 4, 3)[14].
En réalité, le comportement de Tobit, malgré son caractère étrange et extraordinaire, n’est guère sans fondements. Selon le prophète Jérémie, l’absence de sépulture était déjà considérée comme une malédiction. Elle était l’une des fruits amers des déviations religieuses en Israël (Jr. 8, 2 ; 9, 21 ; 22, 18-19 ; 36, 30). Néanmoins, bien avant l’homme de Dieu, existait certainement. Ainsi, Abraham fit les funérailles à sa femme Sara lorsqu’elle mourut dans le pays de Canaan (Gn. 23.1-20). De même, Joseph n’hésite pas à donner l’ordre pour qu’on organise les funérailles pour son père Jacob (Gn. 50.1-14). Ces cérémonies funéraires duraient régulièrement sept jours (Jdt. 16, 24 ; Gn. 50, 10 ; 1S. 31, 13) durant lesquels on se lamentait bruyamment, on allait nu-tête et nu-pieds (2S 15.30), le visage partiellement voilé (2S 19,5) ; il semble aussi qu’on mangeait la nourriture offerte par les parents ou les voisins (Jr. 16, 7), peut-être pour ne pas se souiller avec des aliments rendus impurs par la présence du cadavre (Nb 19,11-13). Toutes ces ordonnances ont résisté au temps et se sont de plus en plus renforcées à travers les générations. Ainsi, Tobit n’a pas voulu se passer de ces prescriptions coutumières même si quelquefois, leur observation mettait sa vie en danger.
 
              B. Antigone [15]
Œdipe[16], est le fils redouté et redoutable de Laïus et de Jocaste. Sur la route de la Boétie où il s’enfuyait pour échapper à la prophétie de la Pythie, il tue son père, réalisant tout de même le crime pour lequel il s’enfuyait. Après avoir triomphé du Sphinx[17], il est ramené victorieux à Thèbes où il épouse la reine Jocaste. Ainsi fut réalisée la deuxième partie de la prédiction pythienne : Œdipe épousait sa mère. De cette union incestueuse naîtront l’un après l’autre Etéocle, Polynice et Antigone. Dans un duel qui les opposa au sujet du trône laissé par leur père[18], les deux frères s’entretuent. Créon leur oncle, le frère de leur mère Jocaste, qui exerce désormais le pouvoir sur Thèbes, prononce un décret : on refusera les honneurs funèbres à Polynice, le traître à sa patrie[19]. Son cadavre servira de pâture aux animaux. Cependant, Antigone, la sœur de Polynice, défie le Souverain ; elle accomplit les rites funèbres à ses frères. Malheureusement, elle n’échappe pas aux yeux vigilants des espions qui la dénoncent au roi. Conduite vers Créon, elle explique sa conduite : les rites à l’égard des morts ne relèvent pas de sa compétence. Créon qui voit dans la désobéissance civile un risque d’anarchie, maintient son exigence et condamne Antigone à mort, conformément aux termes de son décret.
Hémon le fils du souverain, qui était alors le fiancé de Antigone, tente en vain d’infléchir le roi en lui laissant entendre que le peuple approuve le comportement de la jeune fille, celui des honneurs rendus aux morts. Ce sera ensuite au tour du devin Tirésias de faire part des présages qui laissent clairement voir de quel côté sont les dieux dans cette affaire. Malgré ces arguments non moins négligeables, Créon met d’abord cette interprétation sur le compte d’un complot ; puis, quand le devin lui annonce les conséquences funestes de son obstination, il se laisse fléchir. Il décide de rendre lui-même les honneurs funèbres à Polynice avant de faire délivrer Antigone. Pendant qu’il accomplit les rites, celle-ci, emmurée vivante dans une caverne, se pend ; Hémon son fiancé se suicide sur son corps, sous les yeux du souverain accouru ; quand elle apprendra la mort de son fils, Eurydice se donnera également la mort.
A considérer ses conséquences ultimes, cette scène s’attache à la logique du comportement de Créon en habit de « Tyran », d’homme investi d’un pouvoir qui n’est soumis à aucun organe de contrôle. En tant que tel, Créon n’agit pas en despote ; son décret est conforme au point de vue d’un souverain qui considère qu’une cité ne peut avoir d’obligation à l’égard d’un homme qui avait l’intention de la détruire. Face à lui se lève Antigone pour défendre les obligations dues aux morts : celles-ci ne relèvent pas d’une juridiction humaine, mais appartiennent au domaine d’Hadès. Dans cette optique, Antigone est la seule qui agisse contre le décret. Remarquons tout de même que sa sœur Ismène refusa de participer à son action, mais elle se fait toutefois sa complice en ne la dénonçant pas.
 
CONCLUSION
Nous avons essayé de rendre compte de la mentalité qui témoigne d’une grande attention vouée aux morts. En Afrique surtout où les morts sont considérés comme des ancêtres, les honneurs funèbres sont comme des liaisons entre le mort et ceux qu’il a quittés. Ainsi, après avoir constaté que « partout dans le monde le défunt a été l’objet d’attentions particulières », et que par ailleurs tout cela représente l’effort des sociétés pour « lutter contre les effets dissolvants de la morts », le Professeur Louis Vincent THOMAS, qui a souvent étudié la mort chez les populations d’Afrique, conclut que c’est plutôt une marque de respect, de grande considération et de vénération[20]. Epousant son point de vue, retenons que si l’instant de la mort constitue un hiatus entre la vie physique et celle de l’au-delà, par-delà le fossé de la tombe, les funérailles établissent une passerelle entre les vivants et leurs morts. Et quelque soit la valeur ou l’importance du défunt au sein du clan ou de la collectivité, quelle que soit la moralité dont il a fait montre de son vivant, son cadavre mérite des honneurs. C’est ce que nous avons prouvé à travers les exemples de Tobit et de Antigone qui, l’un et l’autre enseignent à travers leurs comportement méritoires, l’importance des rites funèbres.
Ceux-ci en fait relèvent d’une juridiction divine et s’opposent aux lois d’Etat. Dans le cas de Tobit, nous avons l’exemple d’une fidélité aux lois de Yahveh, fidélité qui ne démentit pas durant sa captivité. Et malgré le danger qu’il encourait, il s’employait à une attitude digne qui le conduisait à la sépulture de ses frères, victimes de leur vengeance. Antigone pour sa part, incarne le respect des lois divines et s’oppose à son oncle, prototype de la raison d’Etat. Autrement dit, Antigone et Tobit renchérissent de façon explicitent les deux premières parties de notre développement. Au demeurant, les comportements et les attitudes qu’inspirent aujourd’hui un défunt sont bien légitimes et ne peuvent être interprétés autrement. Car, rendre les derniers honneurs à un proche, un parent ou autre est une valeur et doit être considéré comme telle. Il est propre à chaque civilisation, à chaque peuple et culture.
 
Rodin Chrysal SEDAGONDJI


[1] P. DEGUENON, L’Au-delà Maxi-Agonlin en dialogue avec la foi chrétienne, Mémoire de fin de formation en cycle de théologie, Saint Gall – Ouidah, Janvier 2001, p. 8.
[2] Cf. P. DEGUENON, L’Au-delà Maxi-Agonlin en dialogue avec la foi chrétienne, Mémoire de fin de formation en cycle de théologie, Saint Gall – Ouidah, Janvier 2001.
[3] M-J. AGOSSOU, op. cit., p. 77.
[4] M-J. MEDEWALE, Christianisme africain : Une fraternité au-delà de l’ethnie, Paris, Karthala, 1987, p. 77.
[5] V. STRAPPAZZON, Communications avec l’Au-delà, Paris, Droguet & Ardant, 1991, p. 23.
[6] Cf. V. STRAPPAZZON, Communications avec l’Au-delà, Paris, Droguet & Ardant, 1991, p. 11.
[7] Toutes les références bibliques sont celles de la Ste Bbible traduite par L. PIROT – A. CLAMER, tomes II et IV, Paris, Letouzey et Ané.
[8] On lira avec grand intérêt le livre de Tobit dans la Bible. Il est classé parmi les livres deutérocanoniques.
[9] C’est l’une des douze tribus d’Israël, dont fait partie Tobit.
[10] Roi d’Assyrie en 726-722 av. Jésus-Christ.
[11] Roi d’Assyrie, un des successeur de Salmanasar, 704-681 av. Jésus-Christ
[12] Cf. L. PIROT – A. CLAMER, La Sainte Bible : Paralipomènes – Esdras-Néhémie – Tobit – Judith – Esther – Job, Tome IV, Paris, Letouzey et Ané, 1949, p.409
[13] Cf. L. PIROT – A. CLAMER, La Sainte Bible : Lévitique – Nombres – Deutéronome, Tome II, Paris, Letouzey et Ané, 1946, p.677
[14] L. PIROT – A. CLAMER, La Sainte Bible : Paralipomènes – Esdras-Néhémie – Tobit – Judith – Esther – Job, Tome IV, Paris, Letouzey et Ané, 1949, p.410
[15] Cf. Sophocle, Les Trachiniennes – Antigone, Paris, « Les Belles Lettres », 1962 ; E. GENEST, Contes et Légendes Mythologiques, Nathan, 1929.
[16] Enfant terrible, prédit par l’oracle de la Pythie à Laïus et Jocaste, qui tuera son père et épousera sa mère. Il réalisera, malgré lui, les prédications de l’Oracle.
[17] Monstre hybride de l’ancienne Egypte, sous l’aspect d’un lion ailé à buste et tête de femme. Œdipe triompha de lui.
[18] Œdipe, ayant découvert qu’il était l’époux de celle qui l’avait mis au monde, sa mère, saisit les agrafes de son manteau et se creva les yeux.
[19] Il était interdit à Athènes d’ensevelir les traîtres dans le sol de leur patrie.
[20] L-V. THOMAS, Art. « Mort » dans Encyclopédia Universalis, cité par V. STRAPPAZZON, op. cit., p. 14.

mardi 24 juillet 2012

PRIERE OFFICIELLE POUR LA PREPARATION A RIO 2013

Père, tu as envoyé Ton Fils Eternel pour sauver le monde et tu as choisi des hommes et des femmes pour que, par Lui, avec Lui et en Lui, ils proclament la Bonne Nouvelle à toutes les nations. Accorde, par la puissance de ton Esprit Saint, les grâces nécessaires pour que brille sur le visage de tous les jeunes le bonheur d'être les évangélisateurs dont l'Église a besoin en ce Troisième Millénaire.
Christ, Rédempteur de l'humanité, c'est avec les bras grand ouverts que Tu accueilles, du haut du mont Corcovado, tous les peuples. Par ton Offrande pascale, Tu nous conduis, avec l'aide de l'Esprit Saint, à la rencontre filiale avec le Père. Les jeunes, qui s'alimentent de l'Eucharistie, T'écoutent à travers la Bible et Te rencontrent dans les autres. Ils ont besoin de ton infinie Miséricorde pour partir sur les chemins du monde comme disciples-missionnaires de la nouvelle évangélisation.
Saint Esprit, Amour du Père et du Fils, envoie sur tous les jeunes ta Lumière, splendeur de Vérité et feu de ton Amour. Qu'animés par les Journées Mondiales de la Jeunesse, ils puissent répandre aux quatre coins du monde la foi, l'espérance et la charité, en devenant promoteurs d'une culture de vie et de paix, ainsi que protagonistes d'un monde nouveau.
Amen!

dimanche 22 juillet 2012

PREMIERE EDITION DE LA FÊTE PAROISSIALE DES JEUNES DE HONDJI


La paroisse Saint Joseph de HONDJI dans le diocèse de Porto-Novo a organisé du Samedi 14 au Dimanche 15 Juillet dernier une grande manifestation dans le but de rassembler les jeunes de la paroisse (Station principale et ses stations secondaires) pour partager ensemble leurs expériences de vie autour de l’Unique Personne du Christ.
Tout a commencé le Samedi vers 7heures par une caravane qui a permis à plus de 500 jeunes de découvrir les stations de la paroisse. En effet, une escale était faite sur chaque station et les jeunes récitaient une dizaine de chapelet et invoquaient le Saint Patron de la station. Arrivés à la Station mère, les jeunes ont reçu un riche enseignement sur le thème : « Jeune ! Quelles attitudes adopter pour ta vie chrétienne ? Comment passer ta jeunesse pour plaire à Dieu ? ». Ce fut une occasion rêvée pour les participants de pouvoir s’instruire et de poser de nombreuses questions. Le Père conférencier, Léon SAGBOHAN, a clôturé son enseignement par une messe célébrée aux intentions de tous ces jeunes. Puis rendez-vous l’après midi pour un match de football qui vit les jeunes rivaliser de talents sportifs avant de révéler leur savoir-faire musical lors du méga concert du soir.
Après la messe solennelle
La journée du dimanche s’est ouverte par la messe solennelle qui a rassemblé les jeunes arborant la tenue confectionnée pour la circonstance. Le Père célébrant qui n’est personne d’autre que l’aumônier paroissial de la jeunesse, Bernardin MAFORIKAN, dans son homélie, a d’abord salué et remercié les parents pour leur présence et soutien à l’endroit des jeunes leurs enfants. Il s’est adressé par la suite aux heureux du jour en les invitant à prendre leur responsabilité dans l’Eglise car l’Eglise de demain est la jeunesse d’aujourd’hui. La jeunesse est l’avenir de l’Eglise. Et, tout comme dans l’Evangile de ce dimanche Jésus choisit les douze qu’il envoya en mission, le célébrant envoyait aussi les jeunes aller annoncer Jésus-Christ dans leurs différents milieux de vie, les exhortant à ne rien emporter si non leurs bonnes conduites et leur modèle de vie : Jésus-Christ.
Le reste de la journée a été consacré à un repas festif au cours duquel se sont succédé différentes prestations d’interprétations, de chorégraphies, de théâtres, de jeux et autres.
En un mot, ce fut une très belle fête dont l’éclat a encore été rehaussé par la visite de l’aumônier diocésain de la jeunesse, le Père Aurel AVOCETIEN, venu encourager et enseigner les jeunes. Il les exhorta à ne pas s’arrêter en si bon chemin mais à persévérer et aider les paroisses environnantes à faire comme eux. Il insista aussi sur l’être chrétien qui doit toujours transparaitre dans tout l’agir du jeune, même sa tenue vestimentaire. C’était un appel à ne pas céder aux extravagances et impudeurs de la mode. Il ne manqua pas de saisir cette occasion pour rappeler et expliquer à tous ces jeunes réunis le projet Foi d’Elite de l’aumônerie et surtout la phase de concours de rédaction d’une pièce de théâtre sur la foi qui est déjà lancée et qui prendra fin le 28 septembre prochain.
C’est difficilement que les jeunes se sont séparés le soir, tant ils en voulaient encore ! Vivement la prochaine édition !
 
Les Pères Aurel et Bernardin

Honoré S. AGOSSOU

lundi 2 juillet 2012

CONCOURS D'ECRITURE D'UNE PIECE DE THEATRE SUR LA FOI

Dans le cadre du projet « Foi d’élite » de production, de promotion et de valorisation des arts pour l’approfondissement de la foi en Dieu, initié par l’aumônerie des Jeunes pour éveiller et réveiller la foi dans le chœur des hommes et pour marquer la prochaine Année de la Foi voulue par le Pape, il est lancé à l’attention de tous les jeunes du diocèse un concours d’écriture d’une pièce de théâtre suivant les conditions définies dans les grandes lignes directrices.
Ce concours, qui constitue une activité de la première partie du projet, a été symboliquement lancé le Dimanche 01er juillet 2012 dernier sur la paroisse Notre Dame de l’Assomption de KOUTI et est prévu pour se clôturer le vendredi 28 septembre 2012.
Avec la grande ambition de ce projet contraste malheureusement notre manque de moyens. C’est pourquoi nous en profitons pour lancer un appel à tous les généreux donateurs sans qui ce projet ne prendra jamais corps. Participez à l'expansion et l'enracinement de la foi par vos dons. Plus vite nous aurons les moyens plus tôt nous le réaliserons le projet pour le bien de tous et l’approfondissement de la Foi.
Chers amis jeunes ! A vos stylos, prêts, écrivez !
Chers bienfaiteurs, nous comptons sur vous !

Aumônerie des Jeunes

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